Khar et la famille Chadrabaal

25/04/2017

À chaque catastrophe où j’interviens, je remarque un animal dont l’histoire résume celle de tous les animaux tenaillés par la faim, la peur et l’itinérance.

«La vue de Khar, si proche de la mort me fendait le cœur. Quand il ne veillait pas sa petite sœur, il tournait en rond, sans but, et se faisait bousculer à l’heure des repas»

Par Scott Cantin, Responsable mondial des communications d’urgence

En Mongolie, j’ai rencontré Khar (Noir), un petit chevreau famélique. Il était faible et extrêmement émacié. Il respirait avec difficulté. La première fois que je l’ai vu, il se tenait seul, à l’écart des autres animaux. En m’approchant, j’ai constaté qu’il veillait le cadavre d’une autre chèvre. Cette petite femelle, sa sœur, s’appelait Tugal. Elle venait de mourir juste avant notre arrivée.

Khar appartient à la famille Chadrabaal, des éleveurs nomades du canton d’Ulaan-Uul, dans la province de Khovsgol. Leur troupeau compte 500 chèvres et moutons, 10 chevaux et 100 bovins, dont des vaches, des yaks et des « khainag » (un croisement entre yak et vache).

The story of Khar and the Chadrabaal family

À quelques pas de la maison, une nuée de vautours et de corbeaux fouillaient les carcasses des animaux qui n’avaient pas survécu à l’hiver. Lkhagvai Chadrabaal disait avoir perdu 10 vaches et quelques chèvres cette année. Leurs moutons et leurs chèvres semblent survivre plus facilement, car ils sont plus petits et peuvent passer les nuits de froid intense dans les gers (tentes).

Le matin de notre visite, nous nous sommes levés avant l’aube. Dehors, nous respirions avec difficulté, tant le froid était intense. Et il ne s’agissait que du court instant entre la chaleur du ger et l’intérieur du Land Rover. Si ces quelques secondes étaient à ce point pénibles en habits d’hiver, comment ces animaux exposés aux quatre vents survivaient-ils, nuit après nuit?

La vue de Khar, si proche de la mort me fendait le cœur. Quand il ne veillait pas sa petite sœur, il tournait en rond, sans but, et se faisait bousculer à l’heure des repas.

L’oncle de Lkhagvai, Batsaa, chef de clan et éleveur depuis toujours, a admis ne pas avoir suffisamment de vivres pour passer l’hiver, qui durait beaucoup trop longtemps. Les animaux faiblissaient et pour certains, le temps était compté. Nous savions qu’il fallait faire quelque chose pour cette famille et ces animaux.

Nous leur avons fourni des vivres et du fourrage d’urgence. Pour les Chadrabaal, cela allait permettre à leurs animaux de survivre jusqu’à ce que l’herbe repousse. J’ai prié Lkhagvai de veiller sur Khar, de s’assurer que les autres animaux ne l’empêchent pas de manger et de boire, le temps qu’il reprenne des forces. Visiblement soulagé de voir l’avenir de ses animaux mieux assuré, il a souri et m’a répondu qu’il ferait de son mieux.

Nous gardons le contact avec les Chandrabaal, et j’espère bientôt pouvoir vous annoncer le rétablissement de Khar.

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