La vie affective de l’éléphant

12/01/2016

Selon Helen Proctor, notre directrice de la sentience animale, la meilleure façon de pleinement apprécier l’éléphant, c’est de l’observer dans la nature.
C’est là qu’il est le plus impressionnant et qu’on peut vraiment saisir son intelligence et la complexité de ses émotions.

Il n’est pas surprenant d’apprendre que, en plus d’être un animal émotionnellement et socialement complexe, l’éléphant est considéré comme l’un des plus intelligents (Plotnik et al., 2011).

Un animal capable d’empathie

L’éléphant est considéré comme l’un des animaux les plus sensibles. Dans mon dernier blogue, j’expliquais comment l’éléphant d’Afrique fait le deuil de ses morts, ce qui prouve son caractère vraiment empathique et sociable.

Les chercheurs ont observé plusieurs cas où des éléphants, et non seulement des mères, défendent les petits en danger, en chassant les prédateurs, en s’interposant dans les jeux trop agressifs ou en éloignant certains individus. Dans ces situations, le petit ne donne pas toujours des signes de détresse, c’est donc le protecteur qui anticipe le danger au lieu de simplement y répondre.

Byrne et ses collègues (2008) croient que dans ces situations, l’éléphant s’inspire de son expérience pour évaluer l’état émotionnel du petit, puis passe à l’action pour empêcher la situation d’escalader et éviter au petit la détresse. C’est un comportement très complexe : peu d’espèces semblent capables de concevoir les sentiments des autres animaux (Byrne et al., 2008).

Des liens très forts l’unissent aux autres

On sait que l’éléphant d’Afrique vit en troupeau de dix à mille individus, alors que celui d’Asie a souvent été considéré comme un éléphant solitaire. Or, de récentes études ont établi le contraire. Sa vie sociale est si sophistiquée qu’il a fallu des années de recherche pour le comprendre, et l’on continue d’en apprendre.

La femelle d’Asie compte entre 10 et 50 proches, qu’elle passe de longues périodes sans voir (de Silva et al., 2011), mais avec qui elle garde contact de façon chimique et acoustique (Soltis et al., 2005).

Elephant mother and calf in the wild

L’éléphant se reconnait dans un miroir

Il n’est pas surprenant d’apprendre que, en plus d’être un animal émotionnellement et socialement complexe, l’éléphant est considéré comme l’un des plus intelligents (Plotnik et al., 2011). On a découvert que l’éléphant d’Asie passait le test du miroir (Plotnik et al., 2006), un test où l’on place des marques sur l’animal pour voir s’il se servira du miroir pour s’inspecter.

S’il se met à s’inspecter, on considère que c’est la preuve d’un haut niveau d’intelligence. Seules quelques espèces en sont capables : les dauphins (Reiss & Marino, 2001) et les chimpanzés (Menzel et al., 1985). Cette aptitude ne se développe chez l’humain qu’à partir de 18 à 24 mois (Plotnik et al., 2009).

Il tire le maximum de son environnement

On a vu l’éléphant d’Asie et d’Afrique utiliser des outils à diverses fins, comme des branches pour chasser les mouches ou de la végétation pour enterrer ses morts (Chevalier-Skolnikoff & Liska, 1993; Hart et al., 2001).

Il existe de nombreuses histoires sur l’usage d’outils chez l’éléphant. Des agents de la faune ont vu des éléphants d’Afrique casser des branches pour bloquer une nouvelle route et la rendre impraticable, puis répéter le manège à quatre reprises quand on retirait les branches. Ce qui est surprennant c’est que cette route devait servir aux chasseurs d’éléphants (Chevalier-Skolnikoff & Liska, 1993).

Il reste encore beaucoup à apprendre sur cet animal fascinant; les chercheurs commencent à peine à comprendre à quel point l’éléphant est intelligent et expressif.

Tous les éléphants n’ont pas cette liberté

Malheureusement, les éléphants qui promènent les touristes sur leur dos n’ont pas la chance d’adopter ces comportements. La vie dans les parcs d’attraction est si loin de leur nature que leur comportement devient méconnaissable.

Nous souhaitons voir les éléphants vivre dans un environnement qui leur est naturel, et c’est pourquoi nous travaillons avec des voyagistes responsables.

Plus de 82 compagnies ont déjà cessé de vendre aux touristes des spectacles et des tours à dos d’éléphant. Signez notre pétition pour que Thomas Cook leur emboite le pas. 

Références et lecture complémentaire

Byrne, R., Lee, P. C., Njiraini, N., Poole, J. H., Sayialel, K., Sayialel, S., Bates, L. A. & Moss, C. J. (2008). Do elephants show empathy?. Journal of Consciousness Studies, 15(10-11), 204-225.

Chevalier-Skolnikoff, S., & Liska, J. O. (1993). Tool use by wild and captive elephants. Animal Behaviour, 46(2), 209-219.

de Silva, S., Ranjeewa, A. D., & Kryazhimskiy, S. (2011). The dynamics of social networks among female Asian elephants. BMC ecology, 11(1), 17.

Hart, B. L., & Hart, L. A. (1994). Fly switching by Asian elephants: tool use to control parasites. Animal Behaviour, 48(1), 35-45.

Menzel, E. W., Savage-Rumbaugh, E. S., & Lawson, J. (1985). Chimpanzee (Pan troglodytes) spatial problem solving with the use of mirrors and televised equivalents of mirrors. Journal of Comparative Psychology, 99(2), 211.

Plotnik, J. M., De Waal, F. B., & Reiss, D. (2006). Self-recognition in an Asian elephant. Proceedings of the National Academy of Sciences, 103(45), 17053-17057.

Plotnik, J. M., de Waal, F., Moore, D., & Reiss, D. (2010). Self‐recognition in the Asian elephant and future directions for cognitive research with elephants in zoological settings. Zoo biology, 29(2), 179-191.

Reiss, D., & Marino, L. (2001). Mirror self-recognition in the bottlenose dolphin: A case of cognitive convergence. Proceedings of the National Academy of Sciences, 98(10), 5937-5942.

Soltis, J., Leong, K., & Savage, A. (2005). African elephant vocal communication II: rumble variation reflects the individual identity and emotional state of callers. Animal Behaviour, 70(3), 589-599.