Serpents en fuite: nouvelle tendance à l’horizon?
15/09/2020
Dans le cadre de mon travail, je communique avec les refuges pour animaux et les services animaliers des villes canadiennes, qui me confirment que la situation est bien pire que ce qu’on voit dans les manchettes.
Par Michèle Hamers, notre directrice de campagne Faune, au lieu de compagnon.
Selon l’Encyclopédie canadienne, il existe 26 espèces de serpents au Canada, et la plupart vivent dans le sud du pays. Comme c’est la région la plus habitée, il n’est pas rare d’en rencontrer, cela n’a rien d’étonnant. Or, on signale de plus en plus souvent des serpents exotiques, non indigènes au Canada. Selon une petite recherche sur Internet, huit serpents non indigènes (surtout des pythons royaux) ont été signalés cet été, dans des terrains de jeux, hangars et rues des villes et villages du Canada. À la même période en 2019, les nouvelles n’en rapportaient que quatre, alors qu’il y en avait que trois en 2018.
Le nombre réel de serpents en fuite est probablement bien plus élevé. Je le sais parce que je l’observe et en entends parler partout. Selon des employés d’animaleries, il n’est pas rare de voir un serpent s’échapper d’une boutique. Et dans mon fil d’actualité Facebook, je vois passer des serpents que des gens ont aperçus et qu’ils tentent d’identifier.
Dans le cadre de mon travail, je communique avec les refuges pour animaux et les services animaliers des villes canadiennes, qui me confirment que la situation est bien pire que ce qu’on voit dans les manchettes.
Serpents dans la nature et histoires d’horreur
Quand je lis des histoires de serpents échappés ou relâchés, elles passent souvent à côté du problème. Elles donnent faussement l’impression qu’il n’y a rien à craindre et que ces serpents sont ‘dociles’ et ‘inoffensifs’. Et c’est vrai que dans bien des cas, l’humain ne risque pas d’être attaqué, mais ces histoires omettent le contexte plus large. Voici quelques détails importants dont on ne parle jamais dans les médias:
- Il se peut qu’un serpent non indigène en fuite dans l’écosystème canadien devienne une espèce envahissante et accapare les ressources au détriment de la faune locale, ou introduise de nouvelles maladies pouvant nuire à la santé de la faune indigène. Ceux qui ne peuvent s’adapter ou s’établir risquent de souffrir et de mourir à l’arrivée de l’hiver.
- Ces animaux exotiques sont souvent achetés sur un coup de tête (dans 43% des cas selon nos études). Il n’est pas rare qu’après avoir ramené un animal exotique à la maison, l’acheteur réalise qu’il n’est pas bien équipé pour soigner son nouvel ami. Il peut être alors tenté d’abandonner l’animal dans la nature ou de l’amener dans un refuge local, qui doit alors en assumer la responsabilité.
- Les serpents perdus ou relâchés proviennent du commerce des espèces sauvages. Il n’est pas raisonnable de garder un serpent à la maison, car il reste toujours génétiquement sauvage. Il a des besoins (comportement, psychologie) complexes que la captivité ne peut satisfaire. La captivité dans nos foyers nuit à leur santé et à leur bien-être.
- Le nombre de serpents évadés ou abandonnés semble augmenter de façon proportionnelle à la popularité des serpents de compagnie. On estime que 164 000 serpents sont gardés comme animaux de compagnie au Canada.
- Il n’existe aucune règlementation sur l’élevage d’animaux exotiques, malgré les risques pour le bien-être des animaux, et pour l’environnement et la santé publique. Selon nos recherches, aucun règlement fédéral, provincial ou municipal n’aborde la question de l’élevage des serpents. Après nos recherches approfondies nous avons détecté plus de 200 élevages de serpents à l’est du Manitoba.
- Le commerce des espèces sauvages est cruel et fait souffrir les animaux à chaque étape. Si le taux de mortalité dans le commerce ne fait pas l’unanimité, selon certaines études il atteindrait 75%.
Histoire de serpents dans les médias en 2020 (en anglais)
- September 1st, 2020, Ball python on the loose in Beamsville described as ‘harmless’ (St. Catharines Standard)
- August 12th, 2020, Carpet python found in shed in Toronto, ON (Narcity)
- August 12th, 2020, Snake, missing since July 2, found under vehicle in neighbourhood in Victoria, BC (CBC British Columbia)
- August 12, 2020, Ball python found in shed in Chatham, ON (BlackBurnNews)
- August 6th, 2020, Blood python missing in Chilliwack, BC (Maple Ridge News)
- July 28th, 2020, Ball python on the loose in Winnipeg, MB (CTV Winnipeg)
- July 14th, 2020, Ball python escaped in Gatineau, QB (National Post)
- June 27th, 2020 Snake found near playground in park in Coquitlam, BC (CBC British Columbia)
- May 21st, 2020, Ball python found in regional park Surrey, BC (CBC British Columbia)
- February 4th, 2020, Dead boa constrictor found near running trail in Nanaimo, BC (Victoria News )
Que faire si vous avez déjà un animal exotique?
Si vous avez déjà un animal exotique, vous devriez consulter un vétérinaire spécialisé, si vous ne l’avez pas fait, pour vous assurer de répondre à un maximum de ses besoins en matière de bien-être. Nous vous encourageons à continuer d’offrir à votre animal ce qu’il y a de mieux le plus longtemps possible. Or, ce qu’il ne faut jamais faire c’est l’abandonner dans la nature. La plupart des animaux ne peuvent survivre seuls dans un nouvel environnement, et ceux qui y parviennent sont une menace pour l’environnement local et la faune indigène: ils accaparent les ressources ou introduisent de nouvelles maladies. Contribuez à garder les animaux sauvages dans leur milieu d’origine en vous engageant à ne jamais acheter d’animal exotique ou à ne pas faire accoupler celui que vous avez déjà.
Ce que vous pouvez faire
- Si vous voyez un serpent égaré ou abandonné au Canada, signalez-le votre SPCA locale ou aux autorités. Aussi, vous pouvez contribuer à notre recherche et collecte de données en nous décrivant l’incident à : info@worldanimalprotection.ca
- Engagez-vous à ne jamais acheter d’animal exotique. En savoir plus ou prendre l’engagement: cliquez ici.
- Signez notre pétition pour mettre fin au commerce des espèces sauvages.
Le commerce d’espèces sauvages, notamment au Canada, favorise le braconnage, l’élevage et le transport d’animaux partout au monde – vendus comme compagnons, nourriture ou produits de luxe; et pour la médecine traditionnelle ou le divertissement.
L’une des stratégies les plus efficaces pour protéger les animaux et les humains est d’enrayer ce commerce. Faites partie de ce mouvement en pleine croissance:
